Je m'imagine cent fois déversant des torrents de mots, les déballer comme ça, en une convulsion perpétuelle, lui dire, tout ce dont j'ai peur, tout ce dont je ris, tout ce dont je rêve, tout ce que je peux, écrire ce que l'encre seule révèle, le voir m'écouter, me répondre vraiment, en tremblant un peu, mais que son étreinte soit la plus forte, presque brutale, mais jamais compatissante, qu'il enlève ce qu'il porte pour que j'y enfouisse dedans, mes rires, mes larmes et que cela me fasse du bien, son odeur, comme ça...Voir qu'il ne veut pas que je me calme mais que tout
se calme.
Lui dire toutes mes injustices, celles vues, perpétrées ou subies, ces
combats dont je ne verrais peut-être jamais la fin, ces tensions
indicibles, et le silence de tout ça...
Toutes ces histoires d'amour
cassées, toujours, brisées, ou décolorées...Tous ces masques qui me
collent à la peau, et tout ce que je ne respire pas.
Lui dire, mes rires, mon soleil, ma chaleur et mes mots de petite fille, ces gestes à la con, ces sourires de n'importe quoi jusqu'aux oreilles, lui montrer ce que les nuages forment, et les couleurs de la musique, la musique de la vie et celle du silence...
Et puis...
Qu'il
me fasse le beau temps, réchauffe toutes ces peines et fasse voler un
éclat de mes rires! Encore et encore! Qu'il m'attache à lui, comme j'ai
pu, trop rarement m'attacher aux autres...Qu'il me tienne devant lui,
en m'expliquant ce qu'il voit et ce que les gens trop ternes ne voient
pas, qu'il râle après moi et se batte pour et contre moi, que les
silences nous rassemblent et dorent nos pilules comme autant de
rayons...Le voir exubérant, conquérant, amant, et enfant. Un sage fou,
un doux dingue. Un musicien, un poète...Ma vie pour un artiste qui ne
me brûlera pas les ailes.
Mais enfin...
Ce portrait n'est
que trop sauvage, trop idéal...Il me rappelle un "celui qui a fait que
Léon, c'était nous deux", il me rappelle celui que je n'ai jamais eu,
celui qui ne sera pas...Ce n'est qu'un soupir, un vœu...Un rêve de
celui qui jouait du piano debout en attendant la groupie du
pianiste...Une chimère des raisons qu'a mon cœur et que ma raison
attend. Follement.